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    le Petit Nicolas payé pour aller à l'école ?

    Autant je ne voulais pas prendre position concernant la loi Hadopi, optant pour une attitude "à la Michel Serre", autant le mini-débat sur la "cagnotte contre l'absentéisme" m'inspire.

    Rappelons (pour ceux qui vivent sur Mars ;-) qu'il s'agit d'une expérience démarrant cette année dans 6 classes de 3 lycées professionnels de l'académie de Créteil qui vise à réduire l'absentéisme, évaluée à 11% environ en moyenne.

    Le principe de cette incitation collective est très bien résumé par Psychologies.com

    Son principe : une cagnotte de départ de 2 000 euros est attribuée à chaque classe. Un « contrat » est établi entre les élèves et les enseignants référents afin de fixer les différents critères – présence en cours, discipline, résultats scolaires – d’attribution d’un abondement – de 800 euros maximum – chaque mois.

    [...] Le pactole sera effectivement utilisé pour financer un « projet collectif ambitieux », précise le Haut-commissariat à la Jeunesse dans la description du projet sur son site internet. « Il ne s’agit pas de financer les dépenses des élèves pour des projets personnels. En aucun cas l’argent n’est transmis directement aux élèves. », se défend d’emblée l’institution. A la différence de la Grande-Bretagne, inspiratrice de l’expérience, où l’EMA (Education maintenance allowance) est directement versée sur le compte de l’élève.

    La nouvelle révélée par Le Parisien a déclenché une véritable levée de bouclier, beaucoup de voix, connues et anonymes, s'expriment contre ce projet, à peu près toutes dans le même sens :

    • le sondage de psychologie.com qui donne, au 12 octobre 2009, 13% de pour et 69% de contre [pour ce que cela vaut, les questions ne sont pas forcément bien posées]
    • sur les 364 commentaires à l'article du Figaro, presque tous fustigent le procédé. Et je note que 364 commentaires en 3 ou 4 jours, c'est pas mal !

    S'ajoutent à ceux-là les commentaires de chroniqueurs ( voir/écouter Guy Carlier sur Europe 1 : La cagnotte anti-absentéisme, un engrenage infernal ) et de personnalités diverses, notamment des syndicalistes : Jean-Claude Mailly qui sur BFM Radio trouve l'initiative lamentable ou François Chérèque sur France Inter. D'abord je me pose la question : pourquoi les journalistes posent-ils la question à n'importe qui ? Qu'en a-t-on à faire de savoir ce que pensent les leaders syndicaux de cette expérimentation ? Ce n'est pas leur domaine il me semble.

    Ensuite je note la réponse de François Chérèque, très différente de toutes les autres que j'ai pu entendre. A la question de Nicolas Demorand qui désirait savoir s'il était choqué par cette cagnotte, Chérèque retourne le problème et se déclare contre ... les punitions collectives ! Très bel exercice de langue de bois qui lui évite de se déclarer en faveur de l'expérience tout en évitant de mentir (quel métier!). Je suppose que l'état de l'opinion ne lui permettait pas d'approuver la mesure, ni même de ne pas se montrer en sa défaveur (donc il se montre en défaveur de quelque chose qui y ressemble ...)

    En tout cas, il finit par dire qu'elle ne le choque pas moralement plus que cela. Et je lui en sais gré ! J'estime beaucoup Chérèque et sur ce coup-là suis entièrement de son avis !

    Tout d'abord, notons qu'il s'agit d'une expérimentation. Pourquoi s'indigner autant et monter sur ses grands chevaux avant d'en avoir eu le résultat ? Personnellement, je suis très curieux de savoir comment elle peut aboutir et je trouve dommage que l'opinion, les gens qui s'expriment sur le sujet, tiennent plus des propos de réactionnaires, nostalgiques d'une école à la papa, ou d'idéalistes bien-pensants qui rêvent de leur monde parfait (en général ce n'est pas le mien ... ;-)

    Ensuite, tous ceux qui s'insurgent contre le coût exorbitant ont-ils fait le calcul jusqu'au bout ? La cagnotte prévoit d'attribuer au maximum 10.000 euros par classe. C'est certes une coquette somme. Cela fait quelque chose comme 300 euros par élève. Un élève de lycée pro coûtant par an 10370 euros, 300 euros représentent donc un peu moins de 3% du coût global. Ce n'est pas négligeable, mais je suis d'avis que cet investissement est très largement "rentabilisé" dans le cas où il correspond bien à une plus forte implication des élèves. De chaque élève en particulier, et du groupe dans son ensemble. On pourrait discuter des heures sur la motivation "normale" d'un élève. Si la motivation lui tombe du ciel, tant mieux ! Mais dans le cas contraire, tous les moyens sont bons ! Si Untel a finalement fait l'effort de venir, d'écouter et de comprendre, peu importe sa "motivation profonde".

    Par ailleurs, il ne suffit pas de dire que c'est le travail des enseignants de motiver leurs élèves. C'est effectivement une part de leur rôle, mais ils ont beaucoup d'autres responsabilités. Quant aux parents, je veux bien qu'ils aient une grande part de responsabilité, mais une fois qu'ils ont démissionnés (pour X raisons), que faire ? En attendant de trouver mieux, soyons pragmatiques, une carotte distribuée collectivement sous la forme d'aide à la réalisation de projet, c'est une bonne idée : simple à concrétiser, efficiente, simple à comprendre.

    Ceux qui s'offusquent parce qu'il s'agit d'argent n'ont rien compris au film : la monnaie est un outil, qui permet entre autre de faciliter les échanges. Dans le cadre de l'expérience, l'argent concrétise immédiatement les enjeux aux yeux des concernés (et nous sommes tous concernés par l'éducation et la formation de nos amis, enfants, futurs collègues) , au lieu de laisser miroiter une promesse floue, peu crédible.

    Vous voulez convaincre votre ami(e), votre neveu, votre petit-fils de travailler à l'école. Choisissez la formule la plus convaincante :

    A : si tu travailles bien à l'école, ta vie future sera meilleure.

    B : si, de façon solidaire, toute la classe respecte l'engagement ( de présence, de discipline, ... ), vous toucherez 10.000 € dès juin pour financer votre permis (ou autre)

    C : si tu travailles mal à l'école / sèches les cours, un jour tu t'en repentiras

    (sans vouloir vous influencer, n'oubliez pas qu'avec B aussi votre futur sera plus souriant ... ;-)

    Si le résultat est conforme aux découvertes récentes en psychologie comportementale, il y a toutes les chances que cette initiative soit couronnée de succès : en effet, les recherches montrent que nous sommes (-tous-) enclins à privilégier les petits bénéfices à court-terme plutôt que les gros gains sur le long-terme, or l'avantage pécuniaire est l'un des plus facile à appréhender : en bref, sécher un cours s'avère irrésistible, même si l'on sait qu'on aura à en pâtir à l'avenir. Notre balance interne penche d'autant plus rapidement que l'avenir est lointain et la gratification immédiate ...

    (plus d'info : ici en anglais )

    Olivier

    PS. A propos du Petit Nicolas, si vous l'avez lu, n'allez PAS voir le film.

    Si vous ne l'avez pas lu, lisez-le !

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    les mérites d'Hadopi

    Hadopi, acronyme "Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet" a donc été instaurée par la loi et verra le jour (au plus tard) le 1 novembre 2009.

    J'adore ce genre de loi ! Sans mentir, en voilà une qui aura suscité la polémique : histoire pleine de rebondissements, animant tous les échelons du système politique, aiguillonant le citoyen, l'incitant à prendre part a un débat dont, pour une fois, il n'est pas très difficile de comprendre les tenants et aboutissants. Tout le monde peut avoir une opinion ! Personnellement, ma lâcheté m'empêche de me déclarer dans un sens ou dans l'autre. Je suis en revanche très curieux de voir ce qu'il en adviendra pratiquement : aura-t-elle des conséquences sur le téléchargement de musiques et de films ? Il faut dire que j'ai très jeune été un pirate qui honteusement copiait des disquettes (5'1/4) de jeu vidéo. Pirate, ça fait chic. On peut dire voleur aussi, mais c'est moins chic. Le pirate, c'est le copain qui vous refile le dernier logiciel de traitement de photo à 500 € que-c-est-une-honte-de-le-proposer-à-ce-tarif-là, le voleur, c'est celui qui vous a piqué votre vélo tout neuf à 500 €, peut-être même n'a-t-il pas ses papiers.

    Ce qui m'intéresse le plus avec Hadopi, c'est ce qu'elle révèle de la nature humaine, de notre morale. La plupart d'entre nous ne volerait jamais à l'étalage, pourtant dans mon entourage, peu sont ceux qui rechignent à télécharger illégalement de la musique ou à copier des vidéos. Evidemment, la raison en est simple : à la Fnac, peu de chance qu'on échappe au vigile. En revanche chez soi sur son ordi, ni vu ni connu. Cela vous paraît évident ? Demandez donc au gens pourquoi ils ne volent pas en magasin et puorquoi ils se permettent de voler sur Internet. Je mets ma main à couper que 9 fois sur 10, ils repondront qu'ils sont trop honnêtes pour voler dans un magasin ("il faut rémunérer le commerçant", "le (petit) producteur"), et que télécharger de la musique n'est pas du vol. Même si ce dernier point sera un peu plus long à développer ... "c'est pas du vol parce que cela devrait être gratuit." "Les Majors se font une marge éhontée sur le prix des disques" "les artistes sont assez riches comme cela" ... Franchement, je dirais plutôt que nous avons tous une morale flexible, qui s'adapte très bien au contexte. Faites l'expérience, même si vous avez un peu honte au début de télécharger (et ce n'est pas toujours le cas), vous apprivoiserez très facilement votre conscience !

    Par pitié, soyons honnêtes avec nous mêmes !

    Pour en revenir à Hadopi, j'ai écrit que je n'exprimais pas d'opinion quant à sa légitimité. Pour ce qui est d'un pronostic sur son succès, je me lance : ça ne marchera pas ! Parce que tout le monde télécharge déjà, y compris les députés qui ont voté la loi. Parce que techniquement, il y aura toujours un moyen, et la technique va beaucoup plus vite que le législateur dans ce domaine. Aparté : Des chercheurs d'Alcatel-Lucent viennent de réussir à transférer 400 DVD en 1 seconde entre Paris et Chicago (6000km) : vous comptez 0...1...2...3 et tous les primés de tous les grands festivals de cinéma ont eu le temps de faire le tour de la planète en version longue HD avec en prime tous les doublages et sous-titres ...

    Bref, télécharger illégalement c'est du vol, c'est mal, et force est de constater que nous sommes tous des voleurs quand cela nous arrange. D'un autre côté, ce n'est pas mal que les industries du cinéma et du disque soient contraintes de temps en temps de faire preuve de créativité elles aussi !

    Olivier

    PS Sans compte que je me moque bien que les films à gros budgets puissent se faire ou pas/ le budget d'un film, les revenus d'un chanteur ne sont que de piètres indicateurs de la valeur artistique, mesurée par la résitance au temps qui passe, alors ...